Le mot “estampe” désigne l’impression résultant d’une gravure. La technique consiste à creuser le dessin dans une matrice (souvent en bois ou en métal), qui est ensuite encrée puis imprimée sur une feuille de papier ou tout autre support.

Histoire de l’estampe au Japon

L’histoire de l’estampe au Japon débute en Chine. En effet, ce sont des moines bouddhistes qui les ont importé au pays du Soleil levant, même si les plus anciens spécimens connus viennent du Japon.

Les premières estampes japonaises remontent à l’époque des Kofun (du IVe au VIIe siècle). Mais leur vrai début est en 764, lorsque l’empereur Shooku ordonne que l’on confectionne un million de pagodes miniatures, chacune devant contenir une formule porte-bonheur bouddhiste sur une petite feuille de papier. Pour aller plus vite, plutôt que de les écrire à la main (tâche longue et répétitive), les Japonais ont recours à l’estampe.

XIIè siècle

Au XIIè siècle, les moines bouddhistes nippons doivent, selon les principes de leur religion, répéter le nom de Bouddha afin de parvenir à l’illumination. Ils utilisent donc la reproduction sur gravures pour tenter d’y arriver plus rapidement, de cette manière ils facilitent l’expansion de l’estampe.

XVè siècle

Au XVè siècle, le Japon se dote de son propre style d’estampes (yamato-e). Au début du XVIIe siècle, après de longues périodes de guerres, la paix s’installe plus durablement dans le pays, favorisant ainsi le développement des arts et donc de l’estampe. En effet, les Shoguns restants commandent aux artistes des estampes pour décorer leur château, ainsi que les marchands de Kyoto et d’Edo qui se sont enrichis après avoir financé les guerres. Dès lors apparaissent les premiers rouleaux illustrés, qui seront suivis de près par les premiers livres illustrés avec le développement de la xylographie.

XVIIè siècle

En 1657, Edo est ravagée par un incendie. Pour accélérer la reconstruction, Moronobu convainc les éditeurs de publier ses oeuvres sous forme d’estampes détachées. En effet, ce format permet aux habitants de décorer à bas prix et rapidement leur nouvelle maison en achetant ces estampes dans les boutiques des éditeurs ou à des marchands dans les rues pour le prix d’un bol de nouilles environs. Cet incident a permis de rendre l’estampe populaire auprès des personnes les plus pauvres au Japon.

Ce qui va également ancrer définitivement l’estampe dans la culture japonaise est l’attitude de la bourgeoisie d’après-guerre. En effet, à cette époque les marchands sont riches, mais ils ne cherchent pas à copier l’aristocratie. Ils veulent un art qui reflète la vie quotidienne des gens ordinaires, c’est pour cela qu’ils préfèrent faire réaliser des peintures montrant de belles courtisanes, c’est le début de l’ukiyo-e (浮世絵, littéralement : image du monde flottant).

Petite parenthèse, comme autre exemple de cette différence de goût entre bourgeois et nobles on peut citer le théâtre : les premiers préfèrent regarder les spectacles de kabuki plutôt que les représentations de théâtre nô (celui-ci étant exclusivement réservé aux nobles).

Cette évolution de la société japonaise fait que le kabuki et l’ukiyo-e (ukiyo = "monde qui passe" et e = "estampe") sont liés à plus d’un titre. En effet, les peintres d’ukiyo-e peignent tout d’abord les plus grands acteurs de kabuki. De plus, ils sont nés à la même époque et surtout, ils s’adressaient au même public, les classes bourgeoises de marchands et d’artisans.

Au même moment, dans les villes d’Edo et de Kyoto se sont développés des quartiers de plaisirs, où, selon des rituels très établis, les personnes de toutes classes, mais fortunées, étaient reçues dans les "maisons vertes" (maisons closes), ou dans les "bateaux de plaisir". Ces quartiers étaient dévoués à la prostitution, au délassement et à l’amusement, sous couvert d’être avant tout des quartiers culturels (ce qui n’est pas faux car ils réunissaient écrivains, peintres et opposants politiques en période de censure). La taille de ces quartiers (3289 courtisanes dans 153 "maisons vertes" à Edo en 1869) et leur impact dans la vie de la ville assurent aux peintres d’ukiyo-e ("estampe du monde qui passe" ou "estampe du monde flottant") des revenus confortables pour développer leur art.

Et c’est ce qui va se passer car l’ukiyo-e va se diviser en plusieurs catégories d’estampes (il ne s’agit là que d’un aperçu) :
Abuna-e : estampes représentant des jeunes femmes
Mitate-e : estampes satiriques
Obuki-e : portraits de personnages présentés en gros plan
Shun-ga : "images de printemps" (images érotiques) [l’image est très soft, on est quand même sur un forum ouvert à tous]
Uki-e : estampes utilisant le principe de perspective occidentale

Mais à coté des ukiyo-e ("estampe du monde qui passe"), se développent d’autres types d’images :
Kachô-ga: peintures représentant la nature.
Surimono: estampes de très haute qualité tirées à peu d’exemplaires pour des collectionneurs ou des événements spéciaux (faire-part de naissance ou de mariages, etc.).

Manga : carnet de croquis pour apprenti dessinateur qui lui sert de véritable encyclopédie pour faire ses estampes.

[S’il n’y avait vraiment qu’un type d’estampe à savoir, ne retenez que l’ukiyo-e car pour nous occidentaux, c’est quasiment un synonyme du mot estampe.]

L‘interdiction, notamment entre 1789 et 1801 (ère Kansei), des shun-ga (dessins érotiques) et de toutes représentations de l’Empereur et sa famille fait que beaucoup d’artistes et d’éditeurs doivent fermer boutique à cause d’amendes trop élevées ou de peines d’emprisonnement. Cette censure oblige les peintres d’estampes à trouver d’autres sujets. Profitant de l’essor du voyage touristique des Japonais pour découvrir leur pays au début du XIXè siècle, des peintres tels que Hokusai ou Hiroshige deviennent célèbres grâce à leurs estampes représentant des paysages (meisho-e).

L’histoire de l’estampe aurait pu continuer ainsi mais en 1853, une canonnière américaine force l’isolement du Japon et amorce le déclin de l’estampe dans ce pays.
Il faut attendre les guerres sino-japonaises (1894-1895) et russo-japonaises (1904-1905) pour que l’estampe revienne sur le devant de la scène. Pendant ces périodes, l’armée se sert des estampes pour représenter les différentes victoires sur l’ennemi. Ces estampes de propagandes sont des estampes senso-e ("estampes de guerre"). Elles disparaissent avec l’arrivée de la photographie. [Je n’ai pas réussi à trouver une estampe senso-e, je vous ai mis à la place ce dessin. Il faut imaginer que c’est la même chose, mais sans la croix gammée bien sûr.]

Dans les années 1920-1930, les amateurs d’art ont pu assister à un renouveau de l’estampe. Sous l’impulsion de l’éditeur Watanabe, l’estampe retourne à ce qu’elle a su faire de mieux: des images féminines et sensuelles (sans pour autant être pornographiques). D’autres artistes tel Hasui perpétuent quant à eux la tradition du paysage dans l’estampe. Ce véritable retour vers l’Age d’or de l’estampe est propre au mouvement shinhanga (=néo-ukiyo-e).

Galeries d”estampes

Auteur: Akasuika

4 Réponse à “L’estampe Japonaise”

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